Arrêt maladie : une consultation médicale par téléphone est valable

 

Service juridique CFDT

Dans un arrêt du 17 décembre 2014, la Cour de cassation a jugé qu’un certificat médical de prolongation d’arrêt maladie, établi à la suite d’une consultation médicale par téléphone (c’est-à-dire sans consultation physique) ne constituait pas, un certificat médical de complaisance (Cass.soc., 17.12.14, n°13-24.484 ).

Les faits

Dans cette affaire, très spécifique, une salariée travaillant à la Réunion a envoyé un certificat de prolongation d’arrêt de travail à son employeur. Toutefois, à la suite d’un examen des factures d’appels téléphoniques passés par la salariée avec son téléphone professionnel, l’employeur constate que celle-ci n’était pas à sur l’île lors de la production de l’arrêt de travail puisque l’appel avait été émis depuis la Côte d’Ivoire. L’employeur a donc considéré que le certificat médical, produit à des milliers de kilomètres du domicile de la salariée, et sans consultation physique par un médecin, était un faux et que l’absence de la salariée était donc injustifiée. Cette dernière a été licenciée pour faute grave.

Les règles en matière d’arrêt de travail pour maladie :
Lorsque l’état de santé d’un salarié ne lui permet pas de travailler, ce dernier ne peut pas s’absenter de l’entreprise sans justifier la nature de son absence.

– Quelles sont les obligations du salarié ?

Le salarié doit, en premier lieu, informer son employeur dans les plus brefs délais, et en second lieu, il doit remettre à son employeur un certificat médical d’arrêt de travail. Si aucun délai n’est prévu par la loi, la majorité des conventions collectives prévoit un délai de 48 heures pour justifier une absence liée à la maladie.

– Qui peut prescrire un arrêt de travail ?

La prescription d’un arrêt de travail pour maladie relève du médecin librement choisi par le salarié, le plus souvent il s’agit du médecin traitant. Cet arrêt de travail permet de justifier l’absence du salarié et a pour conséquence de suspendre le contrat de travail. Lorsque le certificat est prescrit, une copie est transmise à la sécurité sociale et une autre à l’employeur.

Dans l’affaire qui nous concerne, la question soulevée était de savoir si un certificat médical dispensé à la suite d’une consultation médicale téléphonique était valable ou non ?

En effet, la question pouvait être discutée dans la mesure où, selon le Code de la sécurité sociale et le Code de déontologie des médecins, ces derniers ne doivent jamais délivrer un certificat sans avoir vu et examiné la personne concernée. Ainsi, si la consultation en elle-même n’était pas valable (consultation par téléphone), l’acte qui en découle – à savoir le certificat médical – ne pouvait pas l’être non plus.

La solution de la Cour

La Cour de cassation n’a pas suivi cette analyse. En effet, la jurisprudence considère que l’employeur n’a pas à apprécier le bien-fondé d’un arrêt de travail (après tout il n’est pas médecin !) En revanche, s’il a des doutes sur la légitimité de cet arrêt, il lui appartient d’apporter la preuve qu’il s’agit d’un certificat médical de complaisance, autrement dit, qu’il s’agit d’un certificat falsifié ou d’un faux. L’établissement d’un faux justificatif d’absence pour maladie est passible de sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave.

Par exemple, produit un faux certificat, le salarié qui modifie les dates de l’arrêt de travail à l’insu de son médecin (1).

En revanche, le fait qu’un certificat médical soit prescrit à plusieurs centaines de kilomètres du lieu de travail, alors que le salarié est en congé (2) ne remet pas en cause, en soi, la validité de l’arrêt de travail.

Compte tenu des circonstances de cette affaire, il était avéré que la salariée avait des problèmes de santé récurrents qui avaient déjà nécessité plusieurs arrêts de travail, la Haute Cour a considéré que l’arrêt de travail prescrit après une consultation téléphonique était valable. Elle reprend l’analyse de la Cour d’appel qui avait conclu « qu’eu égard à l’état dépressif et de la tension élevée de la salariée, le renouvellement de l’arrêt de travail par le médecin traitant sans consultation physique, mais simplement téléphonique, ne relève pas de la fraude ou du faux ».

La Cour en déduit « l’absence de déloyauté de la salariée » et estime par ailleurs, « que l’employeur ne prouvait pas que le certificat médical justifiant l’absence de celle-ci était un certificat de complaisance ».

L’absence de déloyauté de la salariée ajoutée au fait que l’employeur n’a pas apporté la preuve que l’arrêt de travail avait été établit par pure complaisance, la Cour a jugé que le licenciement pour faute grave n’était pas justifié.

Cass.soc., 17.12.14, n°13-24.484

(1) Cass.soc., 12.02.85, n°82-42.983

(2) Cass.soc., 13.07.04, n°02-45.438