La deuxième réunion de négociation sur l’avenir des retraites complémentaires des salariés du privé s’est tenue le 20 mars 2015.
Elle a permis de préciser avec fermeté la position de la CFDT, celles des autres organisations syndicales vis-à-vis de la proposition de la délégation patronale et de découvrir les nouvelles propositions de cette dernière.
Le contexte
Malgré les accords signés en 2011 et 2013 à la suite des crises financières, de nouvelles négociations sont rendues nécessaires par la dégradation des comptes liée au double facteur des conséquences de la situation économique toujours atone et des déséquilibres démographiques (papy-boom et allongement de l’espérance de vie des retraités).
La première réunion de négociation du 17 février dernier a permis d’entendre la proposition initiale patronale et la position des organisations syndicales.
Au total, la délégation patronale demande des efforts pour retrouver un équilibre technique en 2020 :
– aux actifs (baisse du rendement du régime avec fixation des salaires de référence en fonction de l’évolution annuelle moyenne des salaires majorée de 3,5% de 2016 à 2018) ;
– aux retraités (gel des revalorisations des pensions par gel de la valeur de service du point de 2016 à 2018).
A noter qu’en l’absence d’inflation, les efforts se concentrent essentiellement sur les cotisants, donc les salariés en activité professionnelle. La délégation patronale exonère les entreprises de tout effort.
Par ailleurs, elle propose des mesures nouvelles impliquant un « choix » des assurés :
– diminution du taux de réversion avec option de minoration des droits directs,
– abattements temporaires et dégressifs.
Elle propose également de réduire les droits des chômeurs à hauteur de la contribution actuelle de l’UNEDIC et de l’Etat.
Enfin, elle évoque la création d’un régime unifié en 2019, simple fusion des deux régimes actuels, avec un pilotage stratégique par les partenaires sociaux tous les 4 ans et un pilotage annuel par le Conseil d’administration.
La position de la CFDT
La délégation CFDT[1] souhaite faire avancer la négociation dans l’intérêt des salariés et des retraités que nous représentons, mais aussi des entreprises, qui sont également des bénéficiaires des systèmes sociaux existants qui leur permettent d’externaliser certains coûts salariaux comme nous le constatons dans le haut niveau de recours aux ruptures conventionnelles chez les plus de 50 ans ou l’anémie du taux d’emploi des seniors.
La CFDT refuse tout catastrophisme et tout discours alarmiste, car les partenaires sociaux ont su, par le passé, relever les défis, constituer des réserves conséquentes, qui représentent aujourd’hui l’équivalent de 3 % du PIB, et faire évoluer les régimes quand cela s’est avéré nécessaire.
La CFDT l’affirme :
– l’objectif affiché par le patronat de retour à l’équilibre technique n’est pas inscrit dans le relevé de conclusions du 14 mars 2014 et n’est, de toute façon, pas atteignable avec le taux d’inflation actuel.
– pas question d’alourdir la « facture » au détriment des actifs ou des nouveaux retraités.
– la CFDT attend que des efforts soient aussi faits par les entreprises.
– les basses pensions doivent être protégées et les salariés qui ne sont pas en emploi ne doivent d’aucune manière être sanctionnés.
– La CFDT demande que soient prises en compte spécifiquement les carrières longues et la pénibilité.
– les droits à la retraite des chômeurs doivent être maintenus.
Mais surtout, la CFDT revendique la création d’un nouveau régime :
– l’histoire de nos régimes est marquée par ce rapprochement : création de l’AGIRC, de l’UNIRS, puis de l’ARRCO, généralisation de la retraite complémentaire dans les années 70, création du régime unique ARRCO en 1999.
– sans mutualisation des réserves, la situation de l’AGIRC aboutirait à demander à ses affiliés des efforts considérables, voire déraisonnables.
– il ne s’agit pas d’une simple addition des deux régimes existants, mais d’une refondation d’un nouveau régime, plus clair, plus lisible et plus juste, avec bien évidemment préservation des droits acquis dans les précédents régimes pour ceux qui y ont cotisé.
– il s’agit également d’apporter à l’encadrement une vraie reconnaissance de leurs fonctions, en y intégrant leurs spécificités, y compris sur leurs retraites. Nous pourrions discuter des contreparties à l’engagement : responsabilité, technicité, initiative par exemple.
Notre proposition consiste à diminuer la tension pour les toutes prochaines années, à demander des efforts nécessaires certes à court terme, mais bien plus raisonnables que ceux proposés dans le texte patronal du 20 février et à définir à l’horizon 2020 avec un calendrier précis, les modalités de constitution d’un nouveau régime de retraite complémentaire.
L’évolution de la position de la délégation patronale
La délégation patronale relève la volonté commune de parvenir à un accord :
– elle convient que le projet de fusion donne du temps et de la profondeur de champ à la négociation, mais insiste sur les mesures à prendre à court terme
– elle ne souhaite pas abandonner le sujet des réversions par précaution et souhaite l’intégrer dans la définition du nouveau régime
– elle maintient sa proposition sur les abattements temporaires dégressifs, mais avec une entrée en vigueur plus tardive (2019 au lieu de 2017)
– elle propose d’identifier les faibles pensions par une approche fiscale
– elle propose de conditionner les efforts demandés à des critères économiques
– elle demande à retravailler sur le sujet des droits à la retraite des chômeurs
Compte tenu des prévisions actuelles du taux d’inflation et des décalages temporels des mesures proposées, elle demande de nouveaux chiffrages (gels des pensions, réversion, abattements) aux services de l’AGIRC – ARRCO et un bilan de l’impact de l’accord de 2013.
La suite de la négociation
Deux dates sont arrêtées pour poursuivre la négociation, qui doit se terminer avant fin juin 2015 pour un accord qui sera mis en œuvre au plus tard en 2017 :
– 3eme séance : vendredi 10 avril 2015
– 4eme séance : mercredi 27 mai 2015
[1] La délégation CFDT était composée de Jean Louis MALYS et Jocelyne CABANAL (secrétaires nationaux), Ivan BERAUD (membre du Bureau national), Virginie AUBIN et Elodie ACHARD (secrétaires confédérales) et Jean-Claude BARBOUL (chef de file ARRCO/AGIRC).